Chasse, pêche ? Oui, mais encore...
Á choisir, même si je n’aime ni l’une ni l’autre, je préfère quand même la pêche. Car je n’ai encore vu personne mourir d’un coup de canne à pêche.
Sauf les poissons bien sûr qui crient en silence !
Je vends pourtant des fusils. Pas de façon concrète et directe, non. Mais plutôt par l’entremise non de la tante Artémise mais bien des autorités politiques de la région où je vis. La Wallonie, vous connaissez ? Mais si, le sud de la Belgique…
Voici dix ans, ou même davantage (qu’en sais-je encore ?), ces autorités politiques ont racheté une chouette fabrique d’armes, une bonne, grande et vieille maison de réputation internationale. Sans consultation préalable, tous les Wallons ont donc été de facto transformés en vendeurs d’armes. Remarquez, les protestations indignées n’ont pas été véhémentes. Ce rachat douteux quant à l’éthique était il est vrai motivé par un argument aussi incontestable qu’indéboulonnable : sauver l’emploi. Il en allait, nous avait-on dit, de l’avenir des huit cents travailleurs et de leur famille.
Que peut-on objecter à cela sans passer pour un salopard de première ?
Peut-être, déjà, si j’osais lever la main et demander la parole, que les armes que j’ai vendues (par l’entremise…) ont sans doute tué depuis lors plus de huit cents personnes ainsi que leur famille. Bien sûr pas des gens de chez nous. Et donc, qu’en ai-je à foutre ?
Peut-être aussi, je redemande la parole, si je peux (« La dictature c’est ferme ta gueule, la démocratie c’est cause toujours ! » Woody Allen), des intérêts obscurs existent-ils derrière ce soutien affiché à cette bonne vieille usine d’armements ?
Mais je ne fais pas de politique !
Je vous avoue que je suis aujourd’hui un marchand d’armes inquiet. Je fourgais depuis toujours mes fusils à Khadafi. En mars 2011 le vent a tourné pour lui. Et fait tournoyé en même temps des parfums de pétrole. Les autorités belges, ici fédérales et non plus régionales, ont lancé leurs avions pour casser la gueule à Mouammar. C’est bien beau et bien noble ( ?) mais à qui vais-je maintenant vendre mes armes ?
Comment cela à ses successeurs ? Attendez que je pédale pour rejoindre le peloton ! Je livrais des fusils à Khadafi pour qu’il puisse se maintenir en place et garde ses robinets bien ouverts. Ses remplaçants sont des démocrates, non ?
Approchez, je regarde si personne n’écoute et je vous le glisse en douce. J’ai compris que les dictateurs utilisent les fusils pour museler les démocrates et que les démocrates ont besoin de fusils pour écarter les dictateurs. Donc les vendeurs d’armes sont toujours gagnants…
Finalement l’investissement des autorités wallonnes était excellent. Pour moi. C’est un placement de bon père de famille, comme on dit. Je suis bien content de vendre des fusils. Et les victimes de mes armes sont si loin qu’elles crient comme les poissons. En silence ! Je ne les entends même pas !
Á dans quinze jours !